le 25/11/2020
Les ministres Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon ont réuni la presse ce jour pour annoncer les principales orientations de la RE2020. La nouvelle réglementation, qui entrera en vigueur l’été prochain, sera appliquée « progressivement », ce qui devrait permettre, selon le Gouvernement, d’amortir les surcoûts immédiats (de l’ordre de 3 à 4%). Parmi les mesures envisagées, une réduction de 30% du Bbio, un recours massif aux matériaux biosourcés, ou encore une diminution de 30% à 40% des émissions de gaz à effet de serre du secteur de la construction.
Lors d’un point presse organisé ce jour, les ministres Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon ont fait le point sur les principales orientations de la RE2020. Elles ont confirmé une entrée en vigueur à l’été 2021 : la première échéance concernera les logements ainsi que les bureaux et l’enseignement. Les bâtiments tertiaires feront l’objet d’un volet ultérieur de la réglementation, en 2022.
Les premiers textes réglementaires (décret et arrêté) pourront être débattus dès le mois de décembre, une phase d’échanges qui permettra de « recueillir les retours et avis techniques de toutes les parties prenantes pour procéder aux derniers ajustements de la future réglementation ». La version définitive du texte pourrait être publiée d’ici la fin du premier trimestre 2021. A noter que le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique devrait rendre un avis sur la question d’ici la fin de l’année, comme nous l’expliquait Christophe Caresche, son Président.
« Révolutionner » le monde de la construction
En introduction de la conférence, Barbara Pompili a déclaré : « Aujourd’hui est un jour important. Nous franchissons une étape décisive ». « Ce défi environnemental va nécessiter beaucoup d’efforts ».
« Il n’y a pas de meilleure énergie que celle que l’on n’utilise pas. L'enjeu maintenant, c'est de décider des moyens, de les traduire de façon extrêmement technique. Une réglementation des bâtiments, c'est finalement un objet complexe, et c'est la noblesse de tous les métiers de l'énergie et de la construction que d'être en capacité de répondre à cette technicité », a déclaré Emmanuelle Wargon, ministre en charge du Logement. Elle a rappelé que la RE2020 s’inspirait du label E+C-, lancé en 2017 ; une expérimentation qui a permis à l’ensemble des acteurs de la construction de travailler sur un indicateur carbone en rappport avec le cycle de vie du bâtiment.
Sobriété, décarbonation et confort d’été
Sur le volet énergie, Barbara Pompili a révélé : « La RE2020 va revenir aux fondamentaux en renforçant les exigences portant sur le Bbio » dont le seuil maximal sera abaissé de 30% pour tous les logements individuels et collectifs ; une exigence « ambitieuse mais réaliste » qui permettra une baisse des consommations et des factures. « La baisse de consommation d’électricité d’une maison neuve avec une pompe à chaleur sera de l’ordre de 200 €/an », a-t-elle avancé. Nouveauté : la réglementation « prendra aussi en compte le besoin de froid dans le Bbio ».
La RE2020 vise une sortie des énergies fossiles dès 2024. « Nous fixerons pour la première fois un seuil maximal d'émissions de carbone pour la consommation d'énergie » : 4kg/CO2/m2/an dès l’entrée en vigueur de la réglementation en 2021 pour les maisons individuelles, et 14kg/CO2/m2/an dans le collectif « qui sera ensuite ramené à 6kg/CO2/m2/an en 2024 ». Seront à privilégier les pompes à chaleur, les chaudières biomasse ou encore les raccordements vers les réseaux de chaleur urbains. A travers la RE2020, on empêcherait « quasiment qu'il ait du gaz dans les maisons neuves », a reconnu la ministre.
Quid du gaz renouvelable ? Barbara Pompili se réfère tout d’abord au projet Méthaneuf porté par GRDF, un projet complexe que le Gouvernement est en train d’instruire. Pour ce qui est du gaz renouvelable, sa part dans le parc ancien « est franchement négligeable ». C’est là l’enjeu, de venir remplacer le gaz non renouvelable qui alimente le bâtiment existant. « Je crois que le biogaz a beaucoup d'avenir devant lui. D'ailleurs on soutient son développement ».
Pour éviter le retour des convecteurs à effet de joule, un seuil maximal de consommation d’énergie primaire non renouvelable sera défini. Pour ce qui est du confort d’été, outre la prise en compte du froid dans le Bbio, la RE2020 prévoit la mise en place d’un indicateur « qui s’exprimera en degrés-heure (DH) calculé sur la base d’un scénario météo anticipant que chaque été sera à l'avenir comparable à la canicule de 2003 ». « Il correspond au nombre d'heures durant lesquelles un logement peut dépasser la limite de confort ». Il sera interdit de dépasser 1 250 DH quelle que soit la région, « cela peut correspondre à une période de 25 jours par an durant laquelle le logement serait à 30 degrés le jour et 28 degrés la nuit ». « Nous fixerons aussi un seuil bas à 350 degrés-Heure à partir duquel des pénalités s'appliqueront. Celles-ci seront progressives afin d'inciter tous les bâtiments à faire des efforts de conception au bénéfice des ménages ». Les solutions de climatisation dites passives seront encouragées par la réglementation.
Des constructions bas-carbone
Sur la partie construction, « nous allons prendre en compte l’impact carbone sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment » et « pour la première fois fixer des seuils d’exigence carbone en créant des obligations de résultats qui permettront aux constructeurs de garder la liberté de choisir les matériaux et les techniques qu’ils souhaitent mettre en œuvre pour faire baisser les émissions ». Cela va permettre « d’encourager l’innovation tant pour les matériaux comme le béton bas carbone que pour les modes constructifs avec des bâtiments mixtes ».
Le Gouvernement appelle à un recours massif des biosourcés, dont le bois. Il souhaite que l’usage des matériaux biosourcés « se systématise à l’horizon 2030 », qu’il soit même « quasi générale dans les maisons individuelles et le petit collectif y compris pour la structure ». Emmanuelle Wargon précise que le calcul va valoriser le stockage temporaire du carbone. « Ce qui donne une analyse en cycle de vie dite dynamique » qui attribue « un poids plus fort au carbone qui est émis aujourd’hui qu’au carbone qui sera émis demain ».
L’application de la réglementation sera « progressive » pour ne pas fragiliser le secteur et donner le temps également à des filières comme celle du bois, de s’organiser et de penser une production nationale responsable. C’est aussi « un gage de maîtrise des coûts car nous souhaitons que les logements des Français restent abordables ». Le ministère estime que les surcoûts immédiats seront de l’ordre de 3 à 4%.
Sur l’objectif de diminution des émissions de gaz à effet de serre de la construction d'ici 2030 par rapport à la situation actuelle qui sert de référence, « elle sera située entre 30 et 40% selon la typologie des bâtiments ». « Nous avons choisi de cadencer les futures exigences de la RE 2020 à un rythme régulier de rehaussement de ses exigences » pour permettre « aux filières d'avoir de la visibilité et de pouvoir s'adapter, investir, former, anticiper et innover ». Le palier intermédiaire de 2024 sera de l’ordre de – 15%, puis celui de 2027 de – 25%, pour arriver à – 30 voire – 40% en 2030.
« Cette étape de 2021 est celle de la fiabilisation et de l'optimisation de ces analyses de cycle de vie. Cette phase est nécessaire pour caractériser de manière plus exhaustive les équipements et matériels » à travers les FDES, a-t-elle souligné. A ceux qui regrettent que la RE2020 ne soit pas déployée plus rapidement, elle a expliqué que le texte est « déjà une révolution pour le secteur ». L’enjeu est de s’assurer de « la faisabilité et de la soutenabilité de la trajectoire ».
Pour aller plus vite, elle se réfère au Label en préparation qui « pourra prendre compte des critères nouveaux notamment liés à la qualité des logements ». Cela « permettra aux collectivités, aux promoteurs, à tous ceux qui souhaitent se distinguer, de montrer le chemin ». « Nous pourrons envisager d'y lier des aides ou des incitations fiscales », a conclu Emmanuelle Wargon.
Sources:
batiweb.com