le 04/03/2021
C’est l’une des premières questions à se poser au moment d’engager un projet de construction : à qui confier les clés du chantier pour être sûr que les délais seront tenus, que le budget ne sera pas dépassé et que le travail des différents artisans sera bien coordonné ? Sur ce terrain, deux approches sont possibles : faire établir un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) auprès d’un constructeur, ou recourir au service d’un maître d’œuvre indépendant.
Alors, faut-il choisir un constructeur ou un maître d’œuvre pour faire construire à Châteauroux, à Limoges ou autour de Bordeaux ? Etudions d’un peu plus près ces deux modèles.
CCMI : un cadre précisément délimité
Commençons par le contrat de construction de maison individuelle, ou CCMI. Il est établi par un constructeur spécialiste des projets immobiliers qui doit respecter un certain nombre d’obligations définies par la loi.
La première d’entre elle, c’est l’obligation de souscrire une garantie de livraison. En pratique, le constructeur dispose donc d’une assurance chargée de prendre le relais si sa société rencontrait des difficultés financières ou si le chantier venait à être retardé. Pour le client final, il s’agit d’une protection importante face à tous les risques possibles : le constructeur ne peut pas lui faire faux bond.
L’autre grande force du CCMI, c’est la perspective d’une maison livrée clés en main. Imaginez que vous souhaitiez faire construire à Guéret ou à Montluçon : avec ou sans plan préalable, vous allez discuter l’ensemble des éléments constitutifs de votre future maison avec le constructeur, puis parvenir à la construction d’un devis complet. Une fois ce devis accepté et signé, vous disposez d’un délai de rétractation légale, mais vous avez ensuite la certitude que la maison sera livrée dans les temps et sans dépassement de budget : c’est la nature même du contrat de construction de maison individuelle (CCMI) de formaliser les choses de façon si précise.
Le constructeur a donc l’obligation de respecter sa part du contrat, même si des difficultés surviennent au cours du chantier. En cas de problème important, ce sont ses assurances qui rentreront en jeu pour que le client final ne soit pas lésé. Recourir aux services d’un constructeur qui a pignon sur rue et travaille depuis longtemps dans la région offre également un avantage de taille : il est possible d’aller voir concrètement à quoi ressemblent les maisons qu’il a déjà livrées.
En substance, le CCMI offre les avantages suivants :
- Un interlocuteur unique
- Un coût et un délai de livraison sans surprise
- Des garanties précises
Et le contrat de maîtrise d’œuvre ?
On peut préférer confier sa réalisation à un maître d’œuvre plutôt qu’à un constructeur. Dans ce cas, le maître d’œuvre agit comme un intermédiaire entre le client maître d’ouvrage et les entreprises ou les artisans qui construiront la maison. Le recours à un maître d’œuvre offre une plus grande flexibilité, dans la mesure où le choix des prestataires n’est pas arrêté de façon stricte. Après la signature du contrat de maîtrise d’œuvre, le client reste donc sollicité pour étudier les devis et arbitrer les propositions.
La démarche est intéressante pour ceux qui souhaitent étudier chaque élément constitutif de la maison, mais cette flexibilité n’a pas que des vertus. Elle implique en effet la responsabilité du client dans tous les impondérables qui pourraient survenir sur le chantier.
La responsabilité du maître d’œuvre n’est en effet engagée que sur la coordination et l’accompagnement tout au long de la construction. Autrement dit, il ne fournit aucune assurance quant aux retards ou aux dommages, et ne pourra pas être mis en cause si l’un des artisans retenus vous fait faux bond.
Recourir à un maître d’œuvre signifie donc qu’il faut être prêt à s’impliquer personnellement dans le chantier en cas de problème. La souplesse se traduit aussi par une incertitude quand au montant final des travaux, puisque le coût définitif du projet n’est pas connu au moment de la signature du contrat.
En résumé, le maître d’œuvre est une option :
- Plus flexible
- Pas réglementée
- Sans garantie quant aux délais ou au budget.
Constructeur ou Maître d’œuvre : fonctionnement
Tout d’abord, regardons ce qui est commun à tout projet de construction de maison individuelle. Dans tous les cas, vous aurez besoin de faire réaliser les tâches suivantes :
- Le plan : conception sur mesure ou fourniture d’un modèle-type standard
- La gestion des démarches administratives, notamment la demande de permis de construire
- Les études techniques nécessaires aux travaux
- La réalisation des travaux
Sauf si vous faites le choix de l’autoconstruction, les travaux seront toujours réalisés par plusieurs artisans spécialisés. Le type de professionnel (constructeur ou maître d’œuvre) à qui vous allez confier les 3 premières étapes va alors déterminer votre relation avec ces artisans. Regardons alors les différences de fonctionnement entre les deux types de professionnels :
Identifier des professionnels de confiance
Dans tous les cas, soyez vigilants quant aux prestataires que vous allez choisir. Si vous choisissez de faire confiance à un constructeur, vérifiez qu’il propose bien un CCMI et l’ensemble des garanties associées.
Constructeur ou Maître d’œuvre : comparatif, avantages et inconvénients
Le prix
CCMI | Maître d’œuvre | |
---|---|---|
Marge du constructeur VS rémunération du maître d'œuvre | De 25 à 35% du coût des travaux Marge non connue lorsque vous signez un CCMI, elle intègre les frais commerciaux, frais de caution, redevances de franchisé, etc. Cependant, la standardisation et le volume important des commandes peuvent permettre de faire baisser le coût des matériaux par rapport à une construction en maîtrise d'œuvre. Il est très difficile de savoir si cette économie sur les matériaux permet de compenser la marge du constructeur. Chaque cas est unique. Globalement, moins vous demanderez de modifications, plus une maison de constructeur pourra être compétitive face à une maison avec maître d’œuvre. |
De 10 à 15% du coût des travaux Connue de vous dès le départ, cette rémunération s'entend pour une mission complète (de la conception jusqu'à la livraison). Pour la comparer avec la marge du constructeur, il faut rajouter le coût des études de sol, thermiques, etc., soit 1 à 2% du coût des travaux. Ainsi, la rémunération du maître d'œuvre sera à peu près équivalente à la moitié de la marge du constructeur. |
Respect du budget | Garantie de livraison à prix convenu Le prix est fixé au CCMI de façon globale et forfaitaire. Le constructeur a l'obligation d'avoir un garant (assurance ou établissement bancaire) se portant caution pour vous rembourser tout dépassement du prix convenu au CCMI. Sachez toutefois que pour faire jouer cette garantie, il vous en coûtera une franchise allant jusqu'à 5% du prix convenu. |
Budget contractuel Le maître d’œuvre a une obligation de résultat sur le respect du budget : il doit vous fournir des devis d'artisans rentrant dans votre budget maximal. Vous pouvez faire jouer son assurance si jamais le budget n'était pas respecté. Le contrat de travaux avec les artisans est aussi à prix global et forfaitaire. Votre budget maximal définitif est ainsi connu dès la signature du contrat de maîtrise d’œuvre. Attention, des maîtres d’œuvre prévoient des marges de tolérance dans leur contrat : choisissez plutôt ceux qui n'en ont pas ! |
Plus-values et moins-values | À négocier à chaque fois - lorsque des économies sont trouvées en cours d'opération, vous n'avez pas la garantie que le constructeur vous fera bénéficier de la totalité de la moins-value. - quand vous voulez faire des modifications de prestations, vous êtes déjà lié au constructeur et vous ne connaissez pas le détail des prix unitaires du contrat. Vous pouvez alors difficilement juger si le tarif est raisonnable ou pas. - suivant les constructeurs, le prix fixé au CCMI peut augmenter entre la signature du contrat et le début du chantier selon l'indice BT01. |
Transparence et accompagnement - en maîtrise d’œuvre, les économies qui sont trouvées sont obligatoirement et entièrement à votre bénéfice. - lorsque vous souhaitez modifier des prestations, les artisans auront l'obligation de garder les mêmes prix unitaires que ceux de leur contrat de travaux. Ainsi, le fait que vous soyez déjà lié avec eux ne leur permet pas d'être en position de force pour imposer leurs tarifs. De plus, un maître d’œuvre est là pour vous défendre. - il n'y a pas de notion de revalorisation suivant l'indice BT01 en maîtrise d'œuvre. Le budget maximal contractuel reste le même du début à la fin du contrat. |
Modalités de paiement | Suivant un échéancier, avec acomptes Vous payez chaque phase suivant un échéancier réglementé qui s'apparente à des acomptes. En effet, à chaque étape, vous payez plus que la valeur des travaux qui ont été réellement exécutés. À la réception, le rapport s'inverse puisqu'il reste un solde de 5% que vous verserez à la levée de toutes les éventuelles réserves (imperfections). |
À l'avancement réel, sans acompte C'est la règle de base en maîtrise d'œuvre : chaque ouvrage est payé uniquement quand il est terminé et parfaitement réalisé. Une retenue de 5% minimum est appliquée sur les paiements aux artisans tout au long du chantier. Là aussi, les 5% leur sont versés après la réception, après levée des éventuelles réserves. |
Les délais
CCMI | Maître d’œuvre | |
---|---|---|
Respect des délais | Garantie de livraison à délais convenus Le constructeur a l'obligation d'avoir un garant prenant le relai pour terminer la construction s'il venait à déposer le bilan. En cas de retard, la garantie vous verse également des pénalités de retard journalières, avec toutefois une franchise de 30 jours. |
Délais de livraison contractuels Le planning détaillé d'exécution fait partie du contrat de travaux avec les artisans. Il y a un seul calendrier pour tous les artisans, ils sont ainsi solidaires du respect du planning général. En cas de dépassement de délais par un artisan (même pour une tâche intermédiaire), celui-ci vous verse des pénalités de retard journalières, dès le 1er jour de retard. En cas de dépôt de bilan d'un artisan, un nouvel artisan est choisi pour finir le travail. |
Durée du chantier | Durée large Pour une maison de 100 m², comptez entre 9 et 13 mois de travaux. L'échéancier de paiement fournit au constructeur une avance de trésorerie qui ne l'encourage pas vraiment à travailler à flux tendu. |
Durée optimale Comptez entre 7 et 10 mois de chantier pour une maison de 100 m². En maîtrise d'œuvre, il y a peu de temps morts. Vous ne fournissez aucun acompte aux artisans, donc tout le monde cherche à terminer les travaux dans des délais optimaux. |
La qualité de conception et de réalisation
CCMI | Maître d’œuvre | |
---|---|---|
Personnalisation | Personnalisation limitée La compétitivité du constructeur réside avant tout dans la standardisation des plans, des matériaux et des équipements. Généralement, il ne peut pas se permettre d'investir dans un temps de conception important. Même si quelques constructeurs déclarent faire du sur-mesure, il ne s'agira souvent que d'une légère adaptation d'un plan standard. |
Personnalisation illimitée La conception sur mesure est le cœur de métier du maître d'œuvre. Il n'a aucun accord avec un fabricant ou un fournisseur de matériaux. Il conçoit selon votre cahier des charges. Vous l'aurez compris, c'est clairement le plus compétitif dans ce domaine. |
Qualité de conception | Qualité aléatoire La conception n'est pas le cœur de métier du constructeur : vous trouverez ici de tout. La qualité dépend de la personne qui dessine ou adapte le plan chez le constructeur : bureau d'étude, dessinateur, parfois le commercial... Heureusement, les modèles-types de maison sont généralement bien pensés, mais hélas la façon dont la maison est implantée sur le terrain peut la rendre totalement inconfortable. |
Le professionnel de la conception : l'architecte Il convient ici de faire la différence entre l'architecte et les autres maîtres d'œuvre. L'architecte est le seul professionnel formé à la conception et son titre garantit cette compétence. La qualité des maisons d'architecte est largement reconnue et elles offrent une bonne plus-value à la revente. Les maîtres d’œuvre non architectes sont quant à eux non réglementés et peuvent avoir des formations très variées. |
Coordination et contrôle des artisans | Juge et partie La coordination et le contrôle des travaux est effectuée par le constructeur. Rappelons que le constructeur rémunère également les artisans, qui sont ses sous-traitants. Selon nous, cette situation pose un problème vis à vis du client. Le constructeur regardera-t-il son intérêt ou le vôtre ? Ne va-t-il pas être tenté de dissimuler des malfaçons puisque celles-ci vont lui coûter de l'argent ? |
Indépendance La coordination et le contrôle des travaux est effectuée par le maître d'œuvre, professionnel totalement indépendant des artisans. En cas d'imperfection dans l'exécution des travaux, celui-ci prendra une décision qui va dans votre intérêt puisque vous le rémunérez pour ça et qu'il n'est pas financièrement lié aux artisans. |
Le contrat
CCMI | Maître d’œuvre | |
---|---|---|
Cadre légal et réglementation de la profession | Une loi qui réglemente le CCMI Le Contrat de Construction de Maison Individuelle est réglementé par la loi du 19 décembre 1990. Le législateur a prévu des garanties minimales obligatoires dans les CCMI pour la protection du consommateur. Cependant, la profession n'est pas réglementée et il n'y a pas de formation minimale pour être constructeur. |
Une seule profession réglementée : architecte La profession d'architecte, ainsi que le contrat d'architecte, sont réglementés par la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture et par le code de déontologie des architectes. Ces textes garantissent entre autres les compétences de l'architecte, son indépendance et la protection du consommateur. Les maîtres d'œuvre non architectes n'ont pas de réglementation professionnelle et ne sont tenus qu'aux obligations propres à tout professionnel de la construction. |
Etendue du contrat | Attention aux travaux réservés Les CCMI excluent souvent certains travaux importants, notamment les terrassements et en général tout ce qui est extérieur au modèle standard en lui-même. Ces travaux sont dépendants de chaque terrain et sont ainsi ceux qui présentent le plus de risques d'imprévus, et donc de plus-value. Les autres travaux souvent hors CCMI sont : évacuation et remise en place des terres, clôtures, portails, revêtement de voiries et terrasses, cuisine, peinture intérieure, revêtements de sols, placards. Vous devrez contracter directement avec les artisans concernés et les gérer vous-même. Tous les travaux dits "de finition" représentent de 25 à 50% du coût final de l'opération. |
Des travaux à la carte Vous choisissez la liste des travaux à inclure dans le contrat de maîtrise d'œuvre. Rien ne peut la limiter. |
Transparence | Relativement opaque L'idée de l'interlocuteur unique présente l'avantage de ne pas avoir à vous soucier des "coulisses". Son inconvénient est qu'il vous rend le déroulement de l'opération relativement opaque. Combien coûte chaque élément de la construction ? Qui sont les sous-traitants ? Leur situation est-elle régulière ? Quelle marge prend le constructeur ? Vous ne pouvez pas le savoir. |
Rien à cacher Le maître d'œuvre, responsable du suivi des travaux, vous doit un total éclairage sur leur déroulement. Son devoir de conseil envers vous est immense. Vous savez combien coûte chaque élément et chaque intervenant. Vous recevez les comptes-rendus et vous avez un droit d'accès au chantier, aux réunions avec les artisans et aux plans techniques. |
Interlocuteurs | Entreprise unique, interlocuteurs multiples La grande force du CCMI est sans doute l'interlocuteur unique. Ceci est cependant à nuancer car vous aurez souvent affaire à beaucoup d'interlocuteurs différents : commercial, directeur, bureau d'étude, secrétaire, conducteur de travaux, SAV. De plus, le turnover étant important chez les constructeurs, il n'est pas rare que le commercial ou le conducteur de chantier soient remplacés pendant l'opération. Et en plus, il y a bien sûr tous les artisans hors CCMI que nous avons listés plus haut. |
Entreprises multiples, interlocuteur unique Le maître d'œuvre, surtout l'architecte, est dans la majorité des cas une seule et même personne. Il vous accompagne de la signature du contrat jusqu'à la livraison. Pendant le chantier, votre maître d’œuvre est votre interlocuteur principal, voire unique si vous le voulez. Il prend en compte vos remarques et les transmets aux artisans. |
Choix du terrain, du financement et des artisans | Liberté de choix partielle Vous avez la totale liberté de choisir le terrain et le financement que vous voulez. Attention toutefois à certains commerciaux qui vous encourageront à prendre le package "terrain + maison" après avoir visité le terrain avec vous. Idem pour le financement, nous vous conseillons de le trouver vous-même. Par contre, vous ne pouvez pas choisir les artisans. Les sous-traitants et le montant de leur devis vous sont inconnus (bien que la loi oblige le constructeur à vous les communiquer et à vous les faire accepter). |
Liberté de choix totale En maîtrise d’œuvre, il n'y a pas de terrain ou financement "appât". Vous choisissez un maître d’œuvre en qui vous avez confiance et sa rémunération ne dépend pas d'une offre promotionnelle. Pour le choix des artisans, il vous appartient totalement. Le maître d'œuvre vous propose les artisans qui présentent les garanties nécessaires et dont le devis est dans votre budget. Mais il ne peut pas vous forcer à contracter avec un artisan en qui vous n'avez pas confiance. |
Pièges à éviter | Attention aux publicités trop alléchantes Le chiffre est suffisamment préoccupant pour le mentionner ici. La DGCCRF a récemment relevé des infractions chez près de 50% des constructeurs français. Les fraudes concernant notamment la publicité mensongère. |
Attention aux maîtres d’œuvre "faux constructeurs" Certaines entreprises ont l'apparence et la méthode de travail de constructeurs, mais se déclarent comme maîtres d’œuvre ou économistes de la construction et ne proposent pas de CCMI. Elles ne font pas réellement de la maîtrise d’œuvre et contreviennent à tout principe de transparence et indépendance. Également épinglées par la DGCCRF, elles sont à fuir. |
Les garanties légales
CCMI | Maître d’œuvre | |
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Garantie de parfait achèvement (1 an) | Incluse | Incluse dans le contrat de travaux |
Garantie de bon fonctionnement (2 ans) | Incluse | Incluse |
Garantie responsabilité civile | Incluse | Incluse |
Garantie décennale (10 ans) | Incluse | Incluse |
Garantie dommages-ouvrages (10 ans) | A prendre directement par le client (obligatoire), parfois incluse dans le CCMI | A prendre directement par le client (obligatoire) |